article tiré du site de France 5 visible ici

Interview : les invisibles se dévoilent
Dernière diffusion le 26 janvier 2004
Invités : Pascale Clark, Thierry Demaizière, Serge Tisseron

 Quand l'intime s'étale sur la Toile

Le journal intime n'est pas une création récente. Mais il évolue. Alors qu'il était principalement une activité de jeune fille, il se masculinise. Et surtout, il se développe à tout va sur Internet. Pourquoi un tel déballage de vies privées au vu de tout le monde ?

Journal sous Prozac. C'est le nom que Sophie avait donné au récit de sa vie. Un titre révélateur de ce que sont ces journaux intimes : une longue suite de complaintes larmoyantes... C'est la conclusion qu'en tire Sophie au moment d'en tourner la dernière page : "Faut pas se leurrer, bloguer c'est quand même un truc de looser". Et d'ajouter : "On a beau trouver toutes les excuses possibles (je fais ça pour m'entraîner à l'écriture, pour le côté thérapeutique, pour me lancer un défi à moi-même), il y a rarement des diaristes épanouis, mariés/2 enfants. Plutôt beaucoup de célibataires en quête de sens."

Tous des loosers, des dépressifs et des solitaires ? Non. Mais des gens en quête de rencontres, oui, souvent. Car ceux qui exposent leurs journaux intimes ne se privent pas pour consulter ceux des autres (il n'y a pas de raison !) et il leur arrive ainsi de nouer des relations. Des rencontres entre diaristes sont même organisées chaque mois dans la capitale, sous le nom de Paris Carnet.

Il fallait y penser : il permet aussi d'échapper à la curiosité de la petite sœur ! Cassiopée veut bien que le monde entier s'immisce dans sa vie mais pas sa cadette. Et l'endroit le plus sûr qu'elle ait trouvé, c'est le Net. En outre, "C'est parfois plaisant d'avoir l'opinion d'autres personnes totalement étrangères à la situation pour nous donner un autre angle de vision", écrit-elle.

Indéniablement, l'exhibitionnisme est un autre motif de l'ouverture au web des journaux intimes. Sandrine Calvet, dite Eve, se livre par fragments de mots, de photos - parfois très intimes. Avec la vidéo, les webcams, les journaux intimes deviennent plus élaborés. Certains en font un art.

Mais le journal intime n'est pas qu'un jeu de l'ego. Le sien, Nicolas le qualifie avec humour de "cyber œuvre de bienfaisance". Son site, qui lui a servi à faire son "coming out", a désormais pour but de faire partager son expérience à ceux qui auraient du mal à accepter ou à faire accepter leur homosexualité. Il est d'ailleurs référencé par de nombreux sites gays. Mais il s'adresse plus généralement à tous ceux qui cherchent "simplement à mieux comprendre ce que peut ressentir un jeune'qui en est'".

C'est dans le même but, humain et pédagogique, que celle qui signe Atchoum92 a lancé son weblog (hélas en suspens). Avec l'ambition de parler de sa maladie - la fibromyalgie, également appelée "maladie de la fatigue chronique" - de manière positive : "Si je tiens à tenir ce journal et à vous parler de ma vie quotidienne, c'est parce que le jour où j'ai appris que j'étais fibromyalgique, je me suis retrouvée seule face à ce mal. Les seuls sites que j'ai visités étaient alarmants et déprimants. Or, ma vie n'est ni alarmante, ni déprimante. Elle est normale !".

Sites visités entre le 19 et le 21 janvier 2004.


Nicolas Filio


francetélévisions
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